Habiter un corps handicapé _ Les comorbidités, ou comment les handicaps organisent une fête sans mon consentement.
[Alt text: Screenshot d'une photo d'un dessin. C'est un bonhomme grossièrement dessiné, colorié en rouge. À côté est écrit : "color in red where you feel pain" Uh... ("Coloriez en rouge là où vous ressentez de la douleur" Ah...)]
Contexte de ce dessin : j'étais au début de mon diagnostic de fibromyalgie, on m'avait donné un document avec une silhouette dessinée de face et de dos. Je devais colorier les endroits où j'avais mal. J'étais en pleine grosse crise, et bah.. basiquement, j'avais mal partout.
Mon corps est en train de me lâcher, parce qu'il subit trop de choses d'un coup. Et ces problèmes s'autoalimentent les uns les autres.
La fatigue et le probable TDAH sont meilleurs potes. Je prends tant de temps et tant d'étapes pour effectuer chaque petite chaîne d'actions.
Je pars dans tous les sens, tout me prend une infinité de réflexions qui elles-mêmes partent dans d'autres pensées et ça en boucle.
Et chacune de ces actions sabordées me fatiguent encore plus.
Je suis fatigué, alors je dors. Sauf que ça suffit jamais. Soit je fais des insomnies. Je manque alors de sommeil, et vivre est une torture. Viennent alors les siestes. Sauf qu'une sieste, chez moi, c'est 1h30 à 2h30. Et malgré cela, je suis toujours épuisé.
Même quand j'ai de longues nuits, je dors très mal. Réveils, jambes sans repos, cauchemars.
Dans l'idéal, dans les périodes de ce type, j'ai besoin de 10 à 12h de sommeil.
Mais c'est rare d'avoir cette possibilité. Et puis même dans ces cas, c'est comme si cetait jamais assez pour rattraper tout le reste de ma fatigue.
Ma batterie interne est toute abîmée. Elle met si longtemps à se recharger, et à l'inverse se décharge en si peu de temps.
Cette fatigue chronique est entre autres liée à la fibromyalgie (même si un autre diagnostic, neurologique, en plus est envisagé). Avec cela viennent donc les douleurs, chroniques elles aussi.
J'ai constamment un niveau basal de douleur.
Mais là, depuis une dizaine de jours, je suis en crise. Une bonne grosse crise.
Ça a commencé par des contractures dans la nuque, les épaules, les trapèzes.
Je me suis dit, bof, pas grave, j'ai dû encore dormir dans une position trop alambiquée (proprioception vous dites ?).
Mais non. Au fil de la journée, la douleur s'est modifiée, et est descendue. Dans les bras, d'abord, puis dans le dos, et enfin es jambes.
J'ai si mal. J'ai l'habitude d'avoir mal, et je suis plutôt dur à la douleur, mais là, j'ai mal.
J'ai mal le matin au moment de me lever du lit le matin. J'ai mal quand je dois me lever après 2 heures sur des sièges d'amphis à la fac.
Quand je le lève, j'ai aussi mon coeur qui se met à battre très, très vite. Et puis ça a du mal à se calmer, et rester debout est compliqué.
Je me sens mal, sans réussir à pointer du doigt tellement cette sensation (cf manque d'interoception). Mais je sens que quelque chose n'est pas normal. Je regarde ma montre. 150 bpm. D'accord. Il faut attendre pour voir le cardiologue.
Ça aussi ça fatigue.
La fatigue, et notamment celle de la fibromyalgie, provoque aussi le brain fog, le brouillard mental.
Rendu ce stade, c'est plus juste du brouillard, c'est devenu plus un smog londonien.
Réfléchir demande une force infinie. Le soir, je deviens tout mou. J'arrive à tenir bon le temps de mes journées, mais rendu chez moi, je m'effondre et le masque tombe.
Parfois, même manger est pénible. Le seul moyen est de manger des choses molles.
Parfois, parler devient quasiment impossible. Je parle très bas, c'est pas très pratique, mais j'arrive pas à plus. Honnêtement c'est deja un miracle que j'arrive encore à peu près à communiquer, et j'ai bien peur que ce ne soit plus le cas en permanence si cette situation dure.
Mes troubles sensoriels aussi font la fête. Je ne supporte plus les voix trop fortes. Je passe mon temps à diminuer la luminosité de mon téléphone, même plus que ce que les réglages de base sont supposés le rendre possible.
Je jongle entre différents types de bouchons d'oreilles et casques anti-bruits.
Me doucher est si difficile.
Je suis aussi en crise digestive, histoire d'ajouter de l'inconfort et de la douleur
Évidemment, le corps est une machine, et parfois, quand ça ne marche pas, plus rien ne marche correctement.
Il y aurait tant de choses à dire, mais je dirais que je me réveille chaque jour avec de moins en moins de cuillères disponibles, et que chaque jour je force jusqu'à l'effondrement, et finalement créé des dettes de cuillères pour le lendemain.
C'est pas la première fois que ça m'arrive, je sais que ça finit toujours par passer, mais perdre à ce point le contrôle de son corps est sacrément terrifiant.
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